Dans la nature, les ombres ne sont jamais neutres, grises ou noires, et ne
devraient pas non plus l’être sur une peinture.Les crayons de couleur gris ne
sont pas non plus totalement incolores. Ils existent dans des tons gris froids et
ombrés, avec une touche de bleu, ainsi que dans un gris chaud, légèrement
jaunâtre.
Modeler avec des ombres de corps
Les ombres propres ou les ombres de corps se trouvent sur les objets euxmêmes. Ces zones reçoivent moins de lumière en raison de la direction de l’incidence de la lumière et ne la reflètent donc que de manière atténuée : la couleur de l’objet apparaît donc plus sombre. Sur les objets angulaires, le côté
lumineux et le côté ombré sont séparés, sur les formes arrondies, la lumière passe progressivement dans l’ombre.
Éclairer et ombrer : Le jaune clair ressort, les tons d’ombre verdâtres s’effacent – et
la poire prend du volume dans cette étude à l’aquarelle.
L’ombre portée comme indicateur de place
L’ombre portée, en revanche, est l’ombre que l’objet projette sur son
environnement, dans ce cas sur la table. En effet, nous ne pouvons pas nous
empêcher d’interpréter les coups de pinceau bleutés sous la poire comme son
ombre, et non comme une quelconque surface colorée sur le papier. Sans cette
ombre portée, la poire flotterait dans l’espace.
L’ombre propre, assombrie par les tons bruns, renforce l’effet plastique. L’ombre portée, en revanche, donne à la poire un appui et une position dans l’espace.
(Aquarelle de Anne Turk)
Il n’est pas nécessaire de peindre séparément la surface de la table. La forme de l’ombre correspondant à l’incidence de la lumière indique déjà l’emplacement et attribue à la poire sa place fixe.
Le ton de l’ombre n’a d’ailleurs pas grand-chose à voir avec la couleur de la table. Le bleu est généralement une nuance d’ombre agréable ; nous en parlerons plus tard.
Pourquoi faire des ombres colorées?
Avec l’ombre propre, les choses sont évidentes : elle assombrit la couleur de
l’objet. Une ombre assombrie avec un gris incolore recouvrirait la couleur d’un
voile gris peu naturel et lui ferait perdre sa luminosité. La nature ne connaît ni
le gris pur ni le noir. Il est donc préférable de choisir des teintes apparentées
ou des teintes qui font au moins partie de la couleur de base.
Les ombres portées grises ou même noires sont encore plus inquiétantes.
Même dans les ombres les plus profondes (qui ne sont noires qu’en
apparence), des reflets et des effets de lumière changeants finissent par
apparaître.
Si vous souhaitez obtenir une couleur d’ombre très foncée, le mieux est de mélanger
l’indigo avec de la laque de crape foncée (de gauche) ou de l’ombre brûlée.
Photo : Franz-Josef Bettag
Ombre sur le blanc
Si vous n’êtes pas sûr de vous en matière d’ombrage, une nuance de bleu peut
vous aider. Il convient presque toujours, mais particulièrement bien aux objets
blancs.
D’où vient cette nuance de bleu ombré dans la neige ? Au soleil, elle apparaît
d’un blanc éblouissant parce que ses cristaux reflètent tout le spectre de la
lumière “blanche” qui l’atteint. Ce n’est pas le cas à l’ombre, où elle prend le
bleu du ciel qui prédomine dans la lumière diffusée.
Jeux d’ombres colorées
Un soleil éclatant produit des ombres profondes avec de forts contrastes. Afin
d’apporter cette ambiance estivale et colorée dans l’image de paysage, cela
vaut la peine d’utiliser avec audace des tons d’ombre inhabituels : ici, dans le
feuillage, il s’agit d’un bleu-vert très profond et froid, dans la prairie, d’un
rouge-brun lumineux mêlé de rouge et d’indigo.
S’y ajoutent de puissantes oppositions clair-obscur. Les taches de lumière
blanche et les reflets apparaissent lors du masquage des zones avec le liquide
de masquage, qui sont peintes après séchage. Le film de masquage est
ensuite retiré et le blanc du papier apparaît. Les arbres apparaissent d’autant
plus sombres : là encore, pas en noir pur, mais dans un mélange d’indigo et
d’ombre brûlée.